20 mars 2016

Kawa

Je suis assise sur cette chaise inconfortable au possible.
Dans cette cuisine qui est un peu la mienne depuis un mois. J'arrive toujours pas à expliquer aux autres. J'pense que je comprends pas moi même et que au fond, je m'en fiche de comprendre.
Je suis un bateau qui as pris le large. Je vogue au grée de chaque vague, sans boussole. Et on verra bien si je trouve un phare. Pas un phare d'ailleurs, un port plutôt. Un endroit où je pourrais reposer mon petit corps dodu. Où je pourrais prendre toute la place avec mes doutes mes colères et mes rires.
Quand je lis mes textes à voix haute dans cette cuisine, ça donne une sonorité très particulière aux mots. Quand je regarde par la fenêtre, c'est une nouvelle vue que je vois. La nuit, j'entends les trains entrer en gare et j'ai chaud. Bien trop chaud.
Le matin quand le réveil sonne j'ai du mal à me lever. Du mal à passer la porte. J'me demande combien de fois je vais encore passer cette fichue porte. J'me demande si il reste quoi que ce soit que je n'ai pas envahi ici.
Je suis de mauvaise humeur tout les matins, j'aimerais dormir mais ça se passe jamais comme ça. Même si ça m'agace au possible, ça finit par me faire rire. Je sais pas comment il fait, il me fait rire quand la colère monte. Il fait retomber toute la hargne qui se crée dans mon bide. Enfin je suis pas en colère le matin, juste extrêmement bougon. Il fait du bruit, il s'obstine à me raconter des trucs dont je me fou. Mais bon, je me réveille quand même. Je finis par m'assoir et j'accepte son café.
Je bois ce café trop fort tout les matins, et j'apprécie. Le café est vraiment dégueulasse en soi. Mais il représente tout ce qui se passe en ce moment, il me raccroche à la réalité. Le goût est trop fort, la tasse est trop chaude et ça brûle mes mains. Mais j'aime vivre ça tout les matins. J'aime attraper la tasse remplie qu'on me tend. Et peut être que bientôt, je serais loin de tout ça et ça me paraîtra comme un souvenir flou. Comme si j'avais tout fantasmé.
Il m'a dit que j'étais pas pareille qu'au début, que j'avais évoluer vite et que j'ai aucun vice.
Je crois que j'ai éveillé sa curiosité.
Je crois que je me plais de plus en plus.
Il m'arrive de déprimer bien sûr. Mais ça dure moins longtemps et j'en retire encore plus de force. Je suis comme ça moi, quand on me montre le chemin j'arrive à me débrouiller.
Si j'en parle aussi calmement c'est tout simplement que je ne pense jamais.
Je ne me demande jamais ce qu'on est.
Je ne me demande jamais où je serais l'année prochaine.
Je ne me demande même pas comment sera demain.
Je prend juste le moment tel qu'il est quand il vient. J'ai lâché le volant et je continue d'accélérer.
Peut être que je serais triste à en chialer. Peut être qu'il aura plus mal que moi. Peut être que je serais déçu. Peut être que ça passera juste calmement, comme ça s'est installé.
Quand je suis ivre, je vois tout ses défauts qui dégoulinent de partout. Et ça me rassure. Parce que ça le rend accessible. Je suis plus en dessous, je me suis hissée à son niveau et j'ai arrêter de le voir comme je voulais l'imaginer. Et c'est vraiment pas le genre de gars que j'attendais. Mais c'est peut être mieux. Il faut arrêter de fantasmer les autres, de les imaginer comme on voudrait qu'ils soient, pour notre bien être. Ils nous apportent tellement plus en étant ce qu'ils sont : maladroit, blessant, lâches parfois sensibles ou snob.
Pour le moment je ne veux pas rentrer chez moi, ici je ne pense pas pareille, je peux évoluer sans le regard des autres. Ici j'ai une place pour pleurer, pour me mettre en colère, pour rire ou dormir.
Le temps, il s'écoule différemment.
C'est le café. Le café dégueulasse. Le café du matin.

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